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RÉDAC
Dossier spécial / Femmes avocates : égalité et sororité
à mener. Et puis, pour moi, “Bâtonnière”, ça ne veut rien dire ! On a le même
grade, le même statut, la même robe que les hommes. Pourquoi vouloir se
faire appeler autrement ? »
Les cartes de visite de Christiane Féral-Schuhl
Peut-être parce que cela participe du combat pour l’égalité entre les hommes
et les femmes. Certes, cela prend du temps. Mais les consciences évoluent.
Prenez Christiane Féral-Schuhl. Pendant des années, elle n’a pas vraiment
pensé à cette question. Et puis, un jour, elle a décidé de se présenter à la campagne pour le bâtonnat de Paris. C’était en 2010. « J’ai été très surprise, confiet-elle. À chaque fois que je faisais un déplacement ou une rencontre, c’était
la première question qu’on me posait : comment voulez-vous qu’on vous appelle ? » Quelle que soit ma réponse, j’avais 50 % de gens mécontents. Et alors,
quand je disais que cela m’était égal, j’avais 100 % de mécontents ! » Une fois
élue, l’avocate spécialisée en droit de la propriété a pris tout le monde de court
en mettant à l’ordre du jour de sa première Assemblée générale, la question
de la féminisation des noms d’avocat(e) pour le barreau de Paris. « C’était un
clin d’œil… »
Elle avait vu mes cartes de visite
Encore que… Christiane Féral-Schuhl gardait bien
en tête cette fameuse campagne au cours de laquelle sur lesquelles il était inscrit
elle avait décidé d’organiser, à son cabinet, un débat “Avocat” plutôt qu’“Avocate”… »
avec trois consœurs dont la célèbre Gisèle Halimi,
La boulette…
avocate du droit à l’avortement en France et statue
indéboulonnable de la condition féminine. « Elle était arrivée à mon cabinet
en disant : “Que les choses soient claires. Je suis venue débattre. Mais je ne
voterai pas pour vous”, raconte Christiane Féral-Schuhl. Elle avait vu mes
cartes de visite sur lesquelles il était inscrit “Avocat” plutôt qu’“Avocate”… » La boulette… Depuis, l’ancienne Bâtonnière a féminisé
ses petits bouts de carton qui affichent, désormais, fièrement ses
fonctions passées et actuelles.
« Bâtonnière, ça fait un peu poissonnière, non ? »
Aussi étrange que cela paraisse, ce sont surtout les femmes
que cette question divise. Avec parfois des arguments de
pure forme. Avocate au barreau de Strasbourg (Bas-Rhin),
Déborah Zouari a voté contre la mesure, estimant qu’elle
n’avait pas besoin d’un article du règlement pour se faire
appeler comme elle le souhaite. « Et puis, ajoute-t-elle dans
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